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Fier.e.s de travailler pour le service public du logement

 

 

6 février 2015 5 06 /02 /février /2015 21:28

Sous-sols, garages, campements ou bidonvilles... servent d’abri pour ceux qui ne sont « pas acceptés ailleurs ». La crise du logement a pris un tour dramatique en France. 

« ON VIT EN CAGE »

 

Au coeur du problème : une politique du logement d’inspiration libérale qui « favorise l’accession à la propriété, réduit le logement social à la portion congrue, tout en favorisant l’investissement locatif (permettre à des déjà propriétaires d’acheter pour louer) via des défiscalisations extrêmement coûteuses pour l’État, du nom de leurs promoteurs/ministres du logement : Scellier, Pinel ». En clair : il s’agit de confier en partie au marché les clés de réponses à la crise du logement. La pénurie, organisée, est donc un formidable terrain de jeu pour promoteurs, propriétaires, qui font flamber les prix. À la clé, des hausses de loyer « vertigineuses » dans les zones tendues (Île-de- France, Rhône-Alpes, l’arc Atlantique). Un ménage en Île-de-France consacre 40 à 45 % de son budget au logement, 28 % dans le reste de la France en moyenne, contre 18 % il y a 10 ans. Mais la pénurie produit aussi une « économie noire » où tous les coups sont permis.

Quand on en parle avec Fatos, elle acquiesce. Elle vit avec sa famille dans un appartement au 25, rue Poissonnière, dans le 4e arrondissement de Paris. En 2011, une société civile immobilière (SCI), ironiquement nommée la Belle Poissonnière, rachète l’immeuble de 800 m2,1,6 million d’euros à la propriétaire, qui y vit elle aussi. La SCI achète à 2 000 euros le m2 et compte bien revendre « à la découpe »... un à un, les appartements à 10 000 euros le m2. Derrière la SCI, deux hommes que l’on retrouve selon societe.com à la tête d’autres SCI ou d’entreprises de conseil en expertise immobilière.

 

QUAND LES MAIRES JOUENT CONTRE LE LOGEMENT SOCIAL : UNE CHUTE DE 9 %

 

Les bailleurs sociaux avaient lancé l’alerte dès juillet. Après les municipales de mars largement remportées par la droite, « 20 300 logements sociaux dont la construction aurait dû commencer sont bloqués par les nouveaux maires », déplorait Jean-Louis Dumont, président de l’Union sociale pour l’habitat, qui regroupe les acteurs du logement social. Cela représente 20 % des projets de construction. 12 000 de ces logements devaient de surcroît sortir des territoires les plus mal dotés, en particulier d’Île-de-France, où le taux de blocage grimpe à 36 % ! Résultat : 106 414 logements sociaux ont été financés en 2014, soit 9 % de moins qu’en 2013. 330 des 770 communes soumises aux obligations de la loi SRU (25 % de logements sociaux dans les villes de plus de 3 500 habitants) ne la respectent pas. Toutes préfèrent payer des pénalités (324 euros par logement manquant) de « peur de devoir accueillir une majorité de chômeurs si elles construisent des HLM », rappelle Jean-Louis Dumont. Une sorte de droit des communes les plus riches à ne pas appliquer la loi.

Trois locataires sont partis. Sept sont encore là, certains, comme Gisèle D. et la famille de Fatos, sont protégés par la loi de 1948. « Un jour, j’ai reçu de l’eau dans ma chambre. Ils venaient d’enlever la toiture sans même nous en parler ! Ça a duré deux mois », raconte Fatos, encore hallucinée. La toiture a été changée, mais « c’est une passoire thermique, c’est seulement pour nous faire partir ». Chez Gisèle D., les toilettes, qui se trouvaient sur le palier et formaient « une excroissance » sur l’immeuble, ont été reconstruites... dans la chambre, sans cloison. Et quand elle a osé se plaindre, on lui a répondu : « Vous n’avez qu’à partir ! » Pour Benoît Filippi, économiste spécialiste de l’habitat, du Réseau Stop aux expulsions locatives, « il s’agit tout simplement de travaux abusifs. Le but n’est pas les loyers, mais la vente rapide et le profit. Les ventes à la découpe en Île-de-France représentent 7 milliards d’euros d’activité, sur les 43 milliards d’euros au total des ventes immobilières en France ». Parfois les loyers peuvent aussi être juteux. Dans le très bourgeois 7e arrondissement parisien, à quelques mètres de ce qui fut le QG de campagne de Hollande, Elsa, 27 ans, et sa mère, Dominique, 49 ans, vivent depuis 10 ans dans 10 m2 pour 800 euros par mois. 10 ans de vie qui s’empilent sur des étagères au-dessus du canapé qui sert aussi de lit. « On se dispute tout le temps », dit d’emblée la mère. « Le sommeil, c’est toujours la raison », disent-elles pourtant en se marrant. Une fois que le lit est déplié, impossible d’ouvrir la porte. « On vit dans une cage ».

 

« TAXE APPARU », JAMAIS VUE...

 

Comment se sont-elles retrouvées ici ? Un travail libéral, de 25 000 à 30 000 euros par an, mais « des employeurs qui ne paient pas pendant 2 ans. Alors, après une expulsion il y a 10 ans, il fallait trouver très vite, sans demande de garant, sans justificatif, il n’y avait qu’ici qu’on nous a acceptées », raconte Dominique. « Je n’ai pas pu payer le loyer pendant 2 ans. » Leur dette locative a atteint la somme de 21 000 euros. Elsa a dû arrêter ses études, faire plein de petits boulots, « de la caisse, à l’animation pour assurer le quotidien...comme manger ». Elles payent le loyer, remboursent 750 euros par mois. Leur propriétaire, une SCI, dont on imagine aisément qu’elle ne paie pas la taxe Apparu (lire l’encadré sur le micrologement), les a traînées devant le tribunal pour les faire expulser.

 

10 % DE LA POPULATION DÉTIENT PLUS DE 50 % DU PATRIMOINE IMMOBILIER, CONTRE 46 % EN 2004.

 

Et puis parfois aussi on oscille entre loyer cher et l’occasion de gagner plus. À Vitry-sur-Seine (94), dans une petite rue paisible, fleurissent les permis de construire. Ça sent la rue qui s’embourgeoise. Au milieu d’une parcelle, reste un hôtel meublé. Ici, 7 travailleurs pauvres, des Français, des régularisés, des sans-papiers. Le plus ancien, Almamy, y vit depuis 11 ans. Félix, lui, depuis 2 ans... Ils n’ont pas de bail, mais une quittance à chaque loyer. Ils lâchent tous les mois 400 euros pour des chambres de moins de 10 m2. Des cafards dans la cuisine, les murs pleins d’humidité. En septembre, le propriétaire leur annonce la vente à un promoteur, ils doivent partir le 1er janvier. Le 9 janvier, il veut murer les entrées de l’hôtel. Avec l’association Droit au logement,les locataires manifestent devant l’hôtel. Personne ne viendra murer. Aujourd’hui, ils n’ont plus de chauffage, veulent qu’on les reloge. On comprend aussi en écoutant Félix à quel point le système est vicieux. « Un marchand de sommeil ? Je ne sais pas. Quand je n’avais rien, il m’a offert un toit. C’est peut-être pourri, mais c’est chez nous ici », lance-t-il. Il faut se loger coûte que coûte. Et rien ne devrait changer. Le conseil général de l’environnement et du développement durable a rendu le 29 janvier, un rapport au gouvernement. Une bombe qui vise à réduire les aides personnelles au logement et à supprimer les aides à la pierre au secteur HLM. Le but : économiser 4 milliards d’euros. Au gouvernement, on se veut rassurant : « Un document de travail », disent-ils.

 

REPERES

 

3,5 Millions de personnes sont mal logées. 10 millions sont touchées à des degrés divers par la crise du logement.

145 500 personnes vivent sans domicile fixe, dont 30 000 enfants.

411 000 personnes sont hébergées chez des tiers de façon contrainte.

28% des dépenses des ménages sont consacrées au logement et même 40 % pour plus d’un locataire sur cinq, selon l’INSEE.

53% de hausse des loyers enregistrée entre 1998 et 2014.

 

MARCHANDS DE SOMMEIL : C’EST PLUS RENTABLE QUE LA BOURSE !

Ils sont médecin à l’hôpital, diplômé d’HEC ou professeur de droit. Voilà quelques-uns des profils de marchands de sommeil qu’a vu passer Stéphane Peu, adjoint au maire, dans sa ville de Saint-Denis (93). C’est « de la délinquance en cols blancs ». « L’autre profil : le blanchiment d’argent et des réseaux mafieux. » Tous, en tout cas, maîtrisent bien le droit et la fiscalité. « Souvent, ils sont capables d’organiser leur insolvabilité, et sont très bien entourés d’avocats », continue Pascal Martin, chef du service technique de l’habitat à la Ville de Paris. Parfois, la justice passe. Un marchand de sommeil de Saint-Denis, multirécidiviste, a été condamné à 12 mois de prison ferme en novembre par le tribunal correctionnel de Bobigny. L’homme, commerçant, a acquis une dizaine de biens, en SCI, ou sous prête-noms. Des immeubles dont il a divisé les appartements, sans autorisation, ou des hôtels souvent frappés d’arrêtés d’insalubrité. Autre exemple de ces marchands de sommeil, un homme qui vit dans un logement social a acheté ce qui ressemble à un local poubelle, et l’a mis en location. Une pièce aveugle de 9 m2. Faux plafond effondré, humidité, installation électrique dangereuse... Pour 650 euros mensuels. Pour Pascal Martin, la logique qui prime, « c’est l’exploitation de la misère. C’est plus rentable que de jouer à la Bourse ». Pour les locataires, c’est aussi le quotidien de menaces, d’expulsions illicites à chaque retard de loyer ou de plaintes de leurs conditions de logement. « Du jour au lendemain, des locataires molestés, des serrures changées, des affaires vidées sur le trottoir », explique Jean-Baptiste Eyraud, au DAL.

 

MICROLOGEMENT : LA FRAUDE FISCALE MASSIVE

Benoist Apparu, alors secrétaire d’État au Logement, l’avait défendue bec et ongles en 2011 : sa taxe, appliquée en 2012, devait mettre un coup d’arrêt aux maxi-loyers des micro-logements. Le principe : faire payer les propriétaires louant, hors charges, plus de 41,37 euros le m2 des logements de moins de 14 m2 dans les zones tendues. Pour un appartement de 14 m2 loué 700 euros, la taxe est de 126 euros par mois,

1 515 euros annuels. Elle varie, en fonction de l’abus, de 10 % à 40 % du loyer mensuel. Selon le collectif Jeudi noir, 76 % des micro-logements devraient y être soumis. Et donc la taxe Apparu devrait avoir rapporté des millions d’euros à l’État. En réalité, elle a rapporté en 2013... 1 325 euros ! L’interdiction pure et simple des loyers indécents serait sans doute plus simple.

 

 

À PARIS, MEUBLÉS TOURISTIQUES, RÉSIDENCES SECONDAIRES ET BUREAUX VIDES

La capitale est la ville de tous les excès immobiliers. Si la vacance des appartements a tendance a reculé, l’explosion des meublés touristiques loués toute l’année, elle, est plus inquiétante. « C’est un phénomène de masse. Les arrondissements du centre sont mités par ce développement des meublés, en réalité de l’hôtellerie, clandestin », explique Ian Brossat, adjoint au logement (PCF) à la maire de Paris. La cible privilégiée de la Mairie : les 4e et 6e arrondissements, les seuls arrondissements qui perdent des habitants. La Ville chiffre à 30 000 le nombre d’appartements ainsi détournés. Régulièrement, des condamnations tombent. L’année dernière, un propriétaire a ainsi été condamné à 25 000 euros par appartement. Il s’était constitué un joli parc hôtelier de 13 appartements loués toute l’année à des touristes. Autre phénomène : les résidences secondaires. « On en a environ 96 000, le phénomène est en augmentation », continue l’élu. La solution, le doublement de la taxe d’habitation. Une délibération sera présentée en ce sens le 11 février au Conseil de Paris. À la clé pour la Ville : entre 20 et 25 millions d’euros. Autre piste : les 1 million de mètres carrés de bureaux vacants, 7 % des bureaux parisiens. « L’objectif est d’aller au-delà de 200 000 m² de bureaux transformés en logements d’ici à 2020. »

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