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30 septembre 2021 4 30 /09 /septembre /2021 13:07
Y a du haut dans le gaz
Gaz, électricité : jusqu’où les prix de l’énergie peuvent-ils grimper ?
La Commission de régulation de l’énergie a annoncé lundi une augmentation record de 12,6% de la facture du gaz au 1er octobre. Une hausse qui suit la tendance de l’été, où les prix avaient déjà nettement augmenté.

par Jean-Christophe Féraud

publié le 28 septembre 2021 à 18h28
 
 
 

«Même les arbres ne montent pas jusqu’au ciel» : les quelque 3 millions d’abonnés au tarif réglementé du gaz (TRVG), qui ont eu la mauvaise idée de conserver ce type de contrat très exposé à la folle envolée des cours des gaz, pourront toujours essayer de se rassurer avec ce vieil adage de boursicoteur avisé. Mais ça risque quand même de piquer un peu quand la prochaine facture signée Engie (ex-GDF) arrivera dans la boîte aux lettres ou la boîte mail. Pour bien commencer la semaine, la Commission de régulation de l’énergie (CRE), qui est chargée de fixer les tarifs et de les adapter aux conditions de marché – en l’occurrence le prix auquel les distributeurs français achètent le gaz russe, algérien ou norvégien – a annoncé lundi en fin de journée une hausse record des prix du gaz : +12,6% TTC au 1er octobre, venant après +8,7% au 1er septembre, +5% en août et +10% en juillet… N’en jetez plus. Essentiellement due à la reprise économique mondiale post-crise sanitaire – tout le monde veut du gaz – cette flambée inédite depuis deux décennies est surveillée comme le lait sur le feu par le gouvernement, qui n’a pas oublié les gilets jaunes. Explications.

Qui est touché ?

Selon la CRE, près de 3 millions de ménages au TRVG vont donc subir cette nouvelle envolée de leur facture de gaz qui risque de ponctionner sérieusement leur pouvoir d’achat. A titre indicatif, la consommation moyenne de gaz d’un foyer en France en 2020 était de 11 187 kWh par an, soit un budget annuel de 849 euros. Les hausses successives, intervenues depuis début de l’été, atteignent donc 25%, soit plus de 200 euros. Et depuis le début de l’année, l’augmentation des tarifs réglementés atteint carrément 57%. De quoi effacer par avance l’effet du «chèque énergie» de 100 euros promis en décembre par le gouvernement aux 6 millions de foyers les plus modestes. Dans le détail, l’augmentation qui interviendra vendredi pour les abonnés au TRVG sera de 4,5% pour les utilisateurs de gaz de cuisson, de 9,1% pour ceux qui ont un double usage (cuisson et eau chaude) et de 14,3% pour les foyers qui se chauffent au gaz. Précision utile : «Les bénéfices d’Engie n’augmenteront pas du fait de cette hausse», la hausse «reflétant strictement l’évolution du coût d’achat des fournisseurs historiques» comme l’ex-GDF, précise la CRE. Et Engie promet que ses conseillers pourront accorder «des étalements de paiement» aux ménages qui en ont besoin.

Mais c’est l’ensemble des 10,5 millions de consommateurs résidentiels de gaz qui risquent bientôt d’être rattrapés par la flambée des cours du gaz. Car si seuls les 2,77 millions d’abonnés d’Engie au TRVG et les 280 000 ayant souscrit une offre équivalente auprès d’un distributeur local (Gaz de Bordeaux, de Strasbourg etc.) sont pour le moment concernés par la douloureuse, les quelque 7 millions de clients ayant choisi une offre de marché à prix fixe auprès d’Engie, EDF, Total Energies ou un autre acteur pour une durée garantie d’un à quatre ans verront vraisemblablement leur facture augmenter à l’échéance de leur contrat : «Les fournisseurs de gaz se couvrent avec des achats à long terme mais l’envolée des prix spots [prévision au lendemain, ndlr] est telle qu’ils devront la répercuter à un moment ou un autre», prédit un acteur financier du marché de l’énergie interrogé par Libération.

 

Comment expliquer cette flambée «historique» du gaz ?

«Cette évolution résulte de la hausse historique des prix du gaz sur le marché mondial qui se répercute sur les coûts d’approvisionnement du fournisseur de gaz Engie», explique la CRE avec fatalisme. Et pour cause, la France ne produit pratiquement pas de gaz naturel ou si peu (avec le gisement du Lacq exploité par Total Energies) et la semaine dernière, les cours à l’achat ont tutoyé les 80 euros le megawattheure en Europe, un plus haut historique, après avoir gagné 30% en quelques jours et 300% depuis le début de l’année !

La fameuse loi de l’offre et de la demande chère à l’économie de marché explique en grande partie ce phénomène inédit depuis près de vingt ans : avec la reprise économique qui intervient avec le début de la fin espéré de la crise sanitaire, les industries énergivores retournent à plein régime un peu partout dans le monde et tout le monde veut du gaz, car les centrales à cycle combiné utilisées pour produire de l’électricité émettent trois fois moins de CO2 que les centrales à charbon. Le prix de la tonne de CO2 qui a dépassé pour la première fois mardi les 65 euros sur le marché des quotas de carbone concourt d’ailleurs à cette ruée sur le gaz.

 

Et alors que les Etats-Unis sont quasi autonomes avec leurs gaz de schiste, la France et la plupart des pays européens sont ultra-dépendants aux approvisionnements venus par gazoduc de Russie, de Norvège ou d’Algérie qui dictent leurs prix sur le marché. Les stocks de gaz sont bas partout en Europe, et même s’il n’y a pas de risque de pénurie en France (où les réserves sont remplies à plus de 85%), la fébrilité des acheteurs sert les pays vendeurs qui pour le coup sont les rois du gaz. Pour ne rien arranger, le géant chinois, qui traverse une pénurie d’électricité, a une soif inextinguible de gaz naturel liquéfié, le GNL, qui se transporte par voie maritime dans de gros navires méthaniers : «C’est simple, ils achètent au prix fort tout le GNL qui passe et les méthaniers se bousculent dans leurs ports», constate le même acheteur cité plus haut. En conséquence, les cours grimpent, grimpent, grimpent, et les syndicats, comme la FNME-CGT (Fédération nationale des mines et de l’énergie) qui dénonçaient depuis des années «la financiarisation du bien essentiel que constitue l’énergie» et prédisaient que le consommateur en paierait le prix, voient leurs pires avertissements se réaliser.

Pourquoi les prix de l’électricité vont-ils, eux aussi, grimper ?

Une mauvaise nouvelle en cache toujours une autre sur le front des dépenses énergétiques des Français : en l’occurrence, «le prix de notre électricité est indexé sur celui du gaz», comme le rappelle Vincent Ringeissen, directeur des marchés chez RTE (Réseau de transport d’électricité). Incompréhensible pour qui sait que 70% de l’électricité française vient du nucléaire, 8% des barrages hydrauliques et 5 à 10% du gaz ? «Sur tous les marchés, c’est le moyen le plus cher à produire qui fixe les prix, à savoir les centrales à gaz dont toute l’Europe a besoin. On a beau avoir beaucoup de nucléaire, c’est le gaz qui sert d’étalon pour fixer les prix de l’électricité sur le marché de gros.» C’est d’autant plus vrai qu’on a toujours besoin de centrales à gaz pour produire de l’électricité l’hiver quand le nucléaire ne suffit pas répondre aux «pointes» de consommation.

 

La sécurité en approvisionnement électrique offerte par les centrales d’EDF limitera l’augmentation de la facture, contrairement à ce qui se passe dans d’autres pays voisins. Mais l’UFC-Que choisir craint un «risque d’explosion» du prix de l’électricité dès le 1er février 2022, quand la CRE adaptera les tarifs réglementés de l’électricité (TRVE) : +10% au bas mot, sachant qu’ils n’ont augmenté «que» de 1,6% en février et 0,48% en août. «Concrètement, cela représentera une augmentation moyenne de 150 euros sur la facture annuelle d’électricité» : soit environ 1 700 euros par an contre 1 550 euros début 2021. Et ce n’est peut-être pas fini… sauf si les conditions de marché se détendent.

L’envolée des prix de l’énergie peut-elle durer ?

Pas de boule de cristal, mais l’envolée du pétrole qui se poursuit, elle aussi, est de mauvais présage. Egalement poussé par la reprise économique et l’ascension des prix du gaz, le cours du baril de Brent (la référence européenne) est repassé mardi, et pour la première fois depuis trois ans, au-dessus des 80 dollars (68 euros). Les automobilistes qui ont déjà constaté que les prix à la pompe ont augmenté en moyenne de 15% depuis le début de l’année n’en ont donc pas fini avec la hausse du carburant. Alors quid de leurs factures de gaz et d’électricité ? «Tout dépendra de l’évolution des cours du gaz qui sont la clé du problème. Si l’on regarde la courbe des achats à terme, on voit que le marché s’attend à un recul l’an prochain. A l’horizon de la mi-2022, les prix sont divisés par deux ? A plus long terme, au-delà de 2023, ils sont à des niveaux tout à fait habituels», expliquait récemment Andreas Gandolfo, analyste chez BloombergNEF au journal les Echos.

 

En clair, les énergéticiens qui achètent du gaz à un ou deux ans parient sur le fait que la flambée actuelle est provisoire et non structurelle. Les prix devraient donc retomber à leur niveau d’avant crise sur ce marché très cyclique de l’énergie. Et si l’hiver est clément, les cours devraient retomber d’ici six mois. A condition que les Russes ne jouent pas trop avec le robinet pour maintenir les prix au plus haut et enrichir encore Gazprom. Vladimir Poutine, qui veut imposer le nouveau gazoduc Nord Stream 2 vers l’Allemagne pour contourner l’Ukraine, savoure son moment. Sa mise en service pourrait aussi détendre les prix.

Que peut faire le gouvernement pour alléger la facture des Français ?

En 2018, la colère des gilets jaunes avait déferlé sur le pavé pour moins que ça. Mais dans ses sondages confidentiels, l’exécutif ne voit pas de signe de colère sur les prix de l’énergie. «C’est un sujet qui nous occupe. On anticipe évidemment, assure un conseiller qui consulte régulièrement ces études. On voit bien l’impact que cela peut avoir sur la reprise et le pouvoir d’achat.» Mais le chèque énergie de 100 euros supplémentaires dégainé dès la semaine dernière pour amortir la facture de 5,8 millions de ménages semble bien léger au vu de la flambée. L’opposition est montée au créneau sur l’air de «la bombe sociale», à l’image de l’ex-ministre socialiste Ségolène Royal ou de Jean-Luc Mélenchon qui dénonce «un enfumage macroniste» et demande «le blocage des prix», tout comme le communiste Fabien Roussel. «Pour faire face aux différentes hausses, j’ai annoncé un chèque énergie exceptionnel […] mais vous avez raison, cela ne suffit pas», a répondu ce mardi le Premier ministre, Jean Castex, à l’Assemblée en promettant «des actions complémentaires qui seront annoncées dans les tout prochains jours». Le sujet inflammable des prix de l’énergie risque de devenir un thème de campagne présidentielle.

 

Alors concrètement que peut faire le gouvernement ? Dans l’immédiat, le seul levier efficace serait une baisse de la TVA actuellement fixée à 20% sur la consommation et 5,5% sur l’abonnement. Mais ce n’est pas une option pour Bercy. L’exécutif plancherait plutôt sur une nouvelle rallonge du chèque énergie, ou de nouveaux mécanismes de lissage dans la construction du prix du gaz sur les calculettes de la CRE. «Ce n’est pas le moment d’en parler, mais le moment d’y réfléchir», a dit ce mardi le président de la CRE, Jean-François Carenco, sur BFM Business. Reste à savoir si les moins aisés des Français seront aussi philosophes en ouvrant leurs prochaines factures.

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