L’encadrement des loyers favorisera les locataires aisés
23 % des loyers parisiens auront droit à un ajustement à la baisse et 25 % de ceux de Lyon. Les loyers de marché stagnent.
Le délai de relocation des logements s’accroît un peu partout en France. - AFP
Des baisses de loyer pour les locataires les plus riches et un risque de hausse pour les plus modestes : le mécanisme d’encadrement des loyers prévu par le projet de loi pour l’accès au logement et à un urbanisme rénové (Alur) risque d’avoir de sérieux effets pervers, selon l’étude d’impact réalisée par l’observatoire interprofessionnel des loyers Clameur. Ses simulations montrent que, sur Paris, où la médiane des loyers ressort (tous types de biens confondus) à 23,30 euros le mètre carré, 23 % des loyers auront droit à un ajustement à la baisse (car supérieurs de plus de 20 % à la médiane), avec une diminution de 16 % en moyenne, voire de 32 % pour les 5 % supérieurs du marché. Or, « a priori, ce ne sont pas les ménages les plus modestes qui habitent les logements les plus chers… », remarque l’économiste Michel Mouillart. A Lyon, les 5 % de loyers les plus élevés du marché baisseraient de 43 %. Reste à cerner dans quelle mesure la baisse profitera aussi à ceux qui louent des microsurfaces à des prix prohibitifs.
Des inconnues subsistent
L’observatoire (qui représente les intérêts des professionnels de la location) se focalise sur les baisses de loyer, donc les pertes de revenu pour les bailleurs, mais a aussi mesuré l’impact de l’encadrement sur l’autre bout du spectre. A Paris comme à Lyon, 9 % des loyers sont sous la médiane minorée et les bailleurs auront le droit de les réévaluer. Cette part monte à 13 % à Marseille. Cette ville est devenue très à la mode depuis dix ans, et les prix de son immobilier ont flambé, tout comme ceux de certains quartiers populaires de Paris, et les locataires en place de longue date risquent d’en faire les frais. Clameur ne mesure toutefois pas l’ampleur de la hausse possible. En fait, alors que l’Assemblée nationale a commencé l’examen du projet de loi Alur, c’est le trou noir sur le sujet, d’autant qu’il subsiste des inconnues et notamment la finesse des médianes que calculeront les futurs observatoires publics : le quartier ? les villes ? ou même, dans certaines régions, l’agglomération ?
Une hausse moyenne de 1,4 % par an depuis 2006
Dans ce contexte, France entière, les loyers de marché ont stagné sur les huit premiers mois de l’année (+ 0,1 % par rapport à la même période en 2012) alors que l’indice des prix à la consommation de l’Insee a progressé de 1 %. En 2012, ils avaient augmenté de 1,2 % soit déjà un point de moins que l’inflation. A fin août, ils ont baissé dans dix régions et seules cinq régions augmentent plus vite que l’inflation. C’est aussi le cas pour quatre des 20 premières villes de plus de 146.000 habitants (Reims, Villeurbanne, Dijon et Lyon). Ils baissent dans huit villes dont Paris (– 0,4 %), Nice (– 0,4 %) et Bordeaux (– 1 %) mais ils y avaient beaucoup monté en 2012 (+ 4,8 % à Paris).
Au final, les loyers progressent en moyenne de 1,4 % par an depuis 2006, soit moins que l’inflation (1,6 %). Mais ils avaient grimpé de 4,1 % par an de 1998 à 2006 et, vu la paupérisation des locataires du parc privé , désormais ça cale. « Partout, les stocks gonflent et le délai de relocation s’accroît », constate François Davy, président de Clameur et de Foncia.