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La « culture d’entreprise » que souhaite mettre en place la nouvelle direction se heurte aux réticences de certains salariés, confirmées par de nombreux départs ces dernières années

Le calme n’est pas revenu à Habitat 17. Quatre ans après le départ de l’ancien directeur Philippe Drujon, sous le feu des critiques, l’office HLM du Conseil départemental de la Charente-Maritime est encore en proie à des tensions.

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Elles sont apparues au cours du dernier conseil d’administration, mercredi 18 décembre. La présidente Dominique Rabelle (vice-présidente du Conseil départemental en charge de l’habitat, Les Républicains), en visioconférence, a été interpellée par Brigitte Desveaux (conseillère départementale, divers gauche) sur une vague de départs parmi les salariés.

Plus d’une cinquantaine d’entre eux, hors contrats à durée déterminée (CDD), aurait quitté le bailleur social, ou aurait été remerciée, depuis quatre ans. Et l‘élue de s’interroger sur les méthodes de management en vigueur. Dominique Rabelle s’est engagée à communiquer les chiffres exacts lors du prochain conseil, en mars (1). N’en reste pas moins des questions sans réponse sur la situation actuelle.

« Tentatives de manipulation »

« Après le départ de l’ancien directeur, on pensait retrouver une certaine harmonie, ce n’est pas le cas », observe Céline Chapron, représentante syndicale (FO) au conseil d’administration. De fait, quelques témoignages anonymes sont récemment parvenus à « Sud Ouest », d’anciens cadres ou de salariés encore dans la maison.

« Des tentatives de manipulation », se défend le directeur général Mikaël Jungers, ex-responsable des ressources humaines qui a succédé à Philippe Drujon en 2020. S’il ne nie pas la cinquantaine de « mouvements » au sein de l’établissement, ces derniers résultent selon lui de plusieurs facteurs. À commencer par les départs en retraite, sept pour la seule année 2024, sur un effectif de 85 employés qui a la particularité de mêler des fonctionnaires – 22 – à des salariés privés, depuis le passage d’Habitat 17 en Établissement public à caractère ou industriel et commercial (Epic) en 2009.

« Les années 2020, 2021 et 2022 ont été compliquées en termes de turnover, explique Mikaël Jungers. Trois directeurs sont partis à l’époque de mon prédécesseur. Il y a eu le Covid-19 et aussi du management, car j’ai fait le choix de m’entourer de gens de confiance. »

« On a conscience des défaillances d’Habitat 17 et on demande à des collaborateurs de travailler différemment, voire de travailler »

« Aujourd’hui, les gens partent aussi plus facilement, ajoute Karen Esnault, responsable des ressources humaines. Or, nous avons beaucoup de difficulté à recruter, à stabiliser nos équipes, en particulier chez les gardiens et les chargés de propreté. »

Le siège d’Habitat 17 à La Rochelle.
Le siège d’Habitat 17 à La Rochelle.Frédéric Zabalza/SO

« Ça heurte les anciens »

Le métier de gardien d’immeuble est ingrat, modestement rémunéré et en première ligne des réclamations des locataires. Certains des 16 gardiens n’auraient pas apprécié la nouvelle organisation appliquée par Habitat 17 depuis cette année. Notamment la mise en place d’un numéro unique par le service de relations clients et le recrutement de managers, chargés de contrôler le travail des gardiens, lesquels doivent désormais rendre des comptes par écrit. « Ça heurte les anciens », confirme Céline Chapron. « C’est assimilé à du flicage, c’est un choc, convient Mikaël Jungers, mais c’est dans un objectif d’amélioration de la qualité de service. On a conscience des défaillances d’Habitat 17 et on demande à des collaborateurs de travailler différemment, voire de travailler. »

Le directeur assume pleinement qu’une « culture d’entreprise » se met en place. Ce qui explique aussi les « mouvements » de l’effectif ces dernières années. « On s’est séparés d’un certain nombre de personnes dans l’intérêt de l’entreprise. À ce jour, on n’a pas eu à la regretter, ni sur le plan de la gestion ni sur le plan juridique. »

« Exigence professionnelle »

En 2016, l’Agence nationale de contrôle du logement social (Ancols) a rendu un rapport sur Habitat 17, faisant état de graves difficultés « sur le plan financier, technique et organisationnel », ainsi que d’une « crise interne majeure » de gouvernance en 2009 et 2012. Un plan de redressement de 200 millions d’euros, dont 38 millions financés par le Département, a permis de remettre à flot l’un des trois principaux bailleurs de la Charente-Maritime. Un début.

« Depuis 2021, nous avons développé la direction de maîtrise d’ouvrage, pour exister sur un territoire en grande demande de logements sociaux, souligne Mikaël Jungers. Reste un dernier chantier, qui est vrai pour tous les bailleurs : améliorer la qualité de service. C’est l’enjeu de 2025. » C’est l’objectif d’un « projet d’entreprise stratégique sur cinq ans », voté par le conseil d’administration en 2024. Il passe par une réorganisation et une « exigence professionnelle », qu’il faut encore faire accepter à l’ensemble des salariés.

(1) D’après les chiffres communiqués par Habitat 17, il y a eu 87 départs depuis 2020, dont 25 % liés aux retraites et décès. Les autres départs sont pour moitié volontaires (75 % pour raisons personnelles), l’autre moitié à l’initiative de l’employeur.